Je ne fabrique pas de la vaisselle, je crée des objets qui traduisent des paysages de lumières et de textures.
Je chemine au gré des mélanges de minéraux et des atmosphères de cuisson pour élaborer chacune des teintes de ces paysages rêvés.
Je choisis mes terres, leurs grains, et chaque émail est le fruit de recherches alchimiques incessantes.
Je façonne la terre, je guide mon geste en imaginant la rencontre entre la cuisson de l’émail et la lumière, comment chaque courbe, chaque recoin, chaque rebord seront sublimés …
Laisser le feu révéler l’objet, qu’il prenne au mieux la lumière pour sublimer les procédés de tournage puis d’émaillage. Le feu donne la vie à la terre, il alchimise les différents minéraux, unit les couches en un objet doté d’une âme.
Je lui abandonne mes réalisations dans l’exploration d’une démaîtrise grandissante et apprenante, veillant sur elles comme une sage-femme suit les contractions d’une future mère, consciente que le travail se fera sans que je ne puisse maîtriser toutes les trajectoires de la flamme.
Cet esprit l’anime et lui permet de transcender sa fonction utilitariste : il est lumière et émotion. Il a le pouvoir de métamorphoser chaque moment du quotidien en expérience de vie unique.
La couleur, la texture de l’émail sont une invitation à contempler notre propre impermanence. L’objet n’est qu’un, mais pour citer Verlaine « il n’est chaque fois ni tout à fait le même ni tout à fait un autre… »
Nées de mes paysages intérieurs, mes créations sont les témoins des saisons et leurs multiples lumières :l’hiver et sa lumière duveteuse, le printemps et ses éclats vivifiants, l’été et ses rayons acérés, l’automne et sa flamme qui vacille, menaçant de s’éteindre à tout moment.
Texte d’Hélène Le Noë, mon amie et connaisseuse de mon travail.
